Printemps 2023 – VOL. 21, N° 2

Marc-Antoine Brière

L’économie du partage repose-t-elle vraiment sur le… partage?

Par Sandrine Rastello

C’est en esquissant des solutions pour un mode de vie plus durable que Marc-Antoine Brière (M. Sc. Stratégie 2020) a trouvé un remède à son anxiété à l’égard de la crise climatique. Et si la pandémie a contrecarré ses plans de recherche-terrain, elle l’a aussi poussé à oser un format inhabituel pour un mémoire en gestion : un essai théorique.

« En m’obligeant à renoncer à la partie empirique de mon travail, la crise sanitaire m’a permis de réaliser un mémoire théorique plus original, audacieux et, à mon avis, plus pertinent », souligne-t-il.

Freiner la surconsommation

En parallèle, l’expérience professionnelle de Marc-Antoine Brière, elle, est bien concrète. Comptable de formation, il travaille pendant cinq ans en France avant de rentrer au Québec en 2017, pour offrir ses compétences à des organismes d’économie sociale comme Équiterre. Attiré par le développement durable, il laisse ensuite les bilans financiers et s’inscrit à la maîtrise.

Son intérêt se porte alors sur l’économie du partage, une appellation qui couvre aussi bien la multinationale Airbnb que La Remise, une coopérative montréalaise dont les membres peuvent emprunter des outils. Ce concept, qui vise à freiner la surconsommation, demeure toutefois marginal, et nombre d’initiatives peinent à grandir.

« Pourquoi ne partage-t-on plus à l’âge adulte, alors qu’on nous encourage tant à le faire enfant? se demande Marc-Antoine Brière. Dans les faits, on sait très peu partager et on sait encore moins comment s’y prendre collectivement. Existe-il des façons de le faire mieux, ou autrement? »

« Dans les faits, on sait très peu partager et on sait encore moins comment s’y prendre collectivement. »

Quelques contradictions

Son mémoire examine le concept d’économie du partage et souligne avec ironie que, contrairement à ce que son nom suggère, celui-ci repose essentiellement sur la propriété privée et l’échange monétaire. « Pourquoi ne voit-on pas plus de projets de type coopératif? se demande-t-il. Seraient-ils plus répandus si on avait d’autres règles de gouvernance? »

Pour répondre à cette question, Marc-Antoine Brière s’appuie sur les travaux d’Elinor Ostrom, corécipiendaire du prix Nobel d’économie 2009, qui a étudié comment de petites communautés locales géraient les ressources naturelles partagées (les « communs ») telles que les zones de pêche ou encore les forêts. Elle en a tiré des principes, notamment au chapitre de la surveillance, de la résolution de conflits et du rôle du gouvernement.

« Les principes qui s’appliquent aux biens communs peuvent aussi s’appliquer à des biens privés si ceux-ci sont mis en commun », explique Marc­Antoine Brière qui, dans son mémoire, illustre sa théorie par deux services d’autopartage, LocoMotion, à Montréal, et Modo, à Vancouver.

Alors qu’il n’a pu travailler ­étroitement avec ces organismes en raison de la crise sanitaire, Marc-Antoine Brière compte maintenant se rattraper au doctorat et « explorer comment l’ambition de développement durable des entreprises se concrétise en décisions financières ».

Pour en savoir plus