10 questions que vous n’avez jamais osé poser à…
10 questions que vous n’avez jamais osé poser à…
Céline Bareil
Par Liette D’Amours
Autrice de plusieurs best-sellers sur la gestion du changement, Céline Bareil s’est forgé une solide réputation dans le domaine. La direction de HEC Montréal lui a d’ailleurs confié le mandat de faciliter et d’encadrer la transition des équipes de travail dans son tout nouvel édifice du centre-ville. Mais, au-delà de son approche en transformation organisationnelle qui a fait sa renommée, Céline Bareil est d’abord et avant tout une femme de cœur et de famille.
Minibio
- Professeure titulaire au Département de management de HEC Montréal et directrice, gestion du changement, pour le projet de construction de l’édifice Hélène-Desmarais
- Née à Shawinigan; a grandi à Tracy
- Cadette d’une famille de deux enfants (un frère)
- Mariée depuis 1984
- Mère d’une fille et mamie d’une petite-fille de 4 ans
- Formation : doctorat et maîtrise en psychologie du travail et des organisations de l’Université de Montréal
- Champs d’intérêt : transformation des organisations, gestion du changement, psychologie du travail et développement organisationnel
- Distinctions :
- Prix du livre d’affaires en gestion des ressources humaines et prix du livre pédagogique Roger-Charbonneau pour le best-seller Gérer le volet humain du changement (2005)
- Prix du livre pédagogique Roger-Charbonneau pour le best-seller Voyage au cœur d’une transformation organisationnelle, coécrit avec Sylvie Charbonneau et Aline Baron (2016)
- Prix du Mérite professionnel de la Société québécoise de psychologie du travail et des organisations (2014)
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Enfant, qu’est-ce qui vous passionnait?
« Jouer à l’école! Ce n’est pas très original, mais l’enseignement a fait partie de mon univers bien avant que ne germe l’idée d’en faire une carrière. Dès l’âge de quatre ans, je m’inventais des classes imaginaires avec de vieux cahiers que je disposais par terre pour symboliser chacun de mes élèves à leur pupitre. Debout devant un tableau, je leur déversais ensuite mon grand savoir et chicanais au détour les plus tannants. (Rires.) Ce jeu a duré des années! Puis, il s’est transformé en aide aux devoirs pour mes amies qui avaient moins de facilité. Il faut croire que j’ai toujours eu cette passion dans le sang. »
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Une figure marquante dans votre vie?
« Ma mère, une femme féministe et avant-gardiste qui aurait aimé vivre à notre époque. Elle s’est mariée à 34 ans, ce qui était rare, et m’a eue quatre ans plus tard. Elle a d’ailleurs beaucoup souffert des inégalités homme-femme. Elle trouvait notamment très injuste de n’avoir pu accéder aux mêmes postes que ses frères dans l’entreprise familiale et qu’on la relègue aux tâches ménagères. Elle a donc quitté la Mauricie pour aller étudier la haute couture à Montréal chez Angelina di Bello, la référence d’alors. Toute sa vie, elle s’est impliquée dans des organisations à vocation féministe et m’a encouragée à poursuivre des études supérieures. »
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Pourquoi avoir d’abord étudié en psychologie du travail plutôt qu’en enseignement?
« Au secondaire, on me disait qu’il n’y aurait aucun avenir en enseignement. Ma mère m’a donc fait rencontrer un conseiller en orientation pour m’aider à faire le meilleur choix en fonction de mes forces et de mes aspirations. Après m’avoir fait passer une batterie de tests pendant toute une journée, il m’a fait découvrir la psychologie industrielle. Plus il me parlait de développement organisationnel, de gestion du changement, de formation des travailleurs, plus je m’y voyais. Il m’avait vraiment bien cernée. La recherche universitaire n’était pas encore dans les plans, mais la passion pour ces champs d’intérêt sommeillait déjà. »
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Comment êtes-vous passée du terrain à la recherche?
« Après ma maîtrise, j’ai travaillé pendant 10 ans en développement organisationnel pour différentes organisations, dans des milieux majoritairement masculins. Je me souviens d’ailleurs encore de mon arrivée dans les garages de la Société de transport de Montréal. (Rires.) Inutile de dire qu’il y avait du chemin à faire sur le plan de l’équité dans cette organisation, dirigée à l’époque par Louise Roy, une femme extraordinaire pour ses idées novatrices et l’avancement des femmes. Puis, après un passage chez Dominion Textile pour implanter l’amélioration continue dans les usines, un chasseur de têtes m’a recrutée pour un poste chez Johnson & Johnson. Ces expériences de terrain ont suscité ma réflexion sur les changements organisationnels. »
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Un événement qui a marqué votre carrière?
« Quelque temps avant que je décide d’entreprendre un doctorat, un vice-président chez Johnson & Johnson m’a soumis une question qui a été déterminante pour le reste de ma carrière. Il se demandait quelles étaient les réactions humaines habituelles face aux changements organisationnels, mis à part la résistance. Il avait l’impression qu’il y avait des phases, des étapes à franchir, mais qu’on ne les connaissait pas suffisamment pour bien intervenir. Sans le savoir, ce dirigeant a soulevé en moi des questionnements qui non seulement m’ont incitée à entreprendre un doctorat, mais qui sont devenus mon sujet de thèse sur les phases de préoccupations et mes champs d’intérêt pour la recherche. »
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Les types de lectures qui vous passionnent?
« J’aime lire des biographies de femmes qui se sont démarquées, de leaders qui ont réussi en affaires malgré les difficultés rencontrées, comme Danièle Henkel et Carly Fiorina; de politiciennes qui sont parvenues au sommet malgré les défis à surmonter, comme Kamala Harris; ou encore de femmes qui ont contribué au succès de grands dirigeants, comme Michelle Obama. J’ai particulièrement aimé lire l’histoire de Justine Lacoste-Beaubien, cofondatrice de l’Hôpital Sainte-Justine, une organisation où j’ai mené bon nombre de travaux de recherche et dont la cause me tient particulièrement à cœur. J’ai beaucoup d’admiration pour les femmes qui pavent la voie pour leurs semblables. »
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Des gens que vous aimeriez réunir à votre table, morts ou vivants?
« Mes parents, décédés trop tôt pour voir grandir ma fille. Elle n’avait que 18 mois au décès de ma mère et cinq ans quand mon père nous a quittés. J’aimerais qu’ils voient la femme qu’elle est devenue et qu’ils rencontrent leur arrière-petite-fille, dont nous sommes très fiers. Chacun dirait ce qu’il pense, perçoit et ressent… Ce serait génial de pouvoir partager les grands moments de notre vie! Ma mère n’a jamais su que j’ai fait un doctorat et que je suis devenue professeure d’université. Je profiterais aussi de l’occasion pour leur exprimer toute ma gratitude pour l’amour et le soutien qu’ils m’ont donnés. »
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Que serait-on surpris d’apprendre à votre sujet?
« Plusieurs choses. J’ai notamment été la reine du carnaval de mon école primaire en sixième année. (Rires.) J’ai aussi été hôtesse-placière pour le Club de hockey junior de Montréal. Après deux parties, ils m’ont promue à la galerie de presse pour accueillir les journalistes sportifs, ce que j’ai bien aimé. Au cours de mes études, j’ai aussi travaillé durant l’été comme secrétaire dans différentes organisations, recommandée par une agence de placement temporaire. Mon objectif était de découvrir divers milieux de travail et d’en comparer les cultures organisationnelles. Je m’amusais déjà à identifier ce qui les distinguait les unes des autres. »
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Vos vacances idéales?
« Il y a des traditions que je prends plaisir à perpétuer. Chaque année, nous louons un chalet de pêche dans une pourvoirie où il n’y a ni réseau cellulaire ni Internet, et encore moins de télévision. J’adore lire au bout du quai ou jouer avec ma petite-fille pendant que mon mari pêche à la mouche. Le soir venu, il nous prépare de bonnes petites truites et nous prenons de bons repas en famille. C’est l’occasion de nous retrouver ensemble dans la nature. Cette coupure totale avec le travail me permet de décompresser et de refaire le plein d’énergie. »
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Les organisations ont-elles changé depuis que vous les observez?
« Il y a 20 ans, les organisations menaient rarement plusieurs changements organisationnels à la fois. Aujourd’hui, c’est différent : les changements sont plus nombreux, simultanés et rapides. On a réalisé certains progrès, notamment sur le plan des conditions de travail, de la qualité de vie, de l’intégration des technologies et de la gestion. Toutefois, les défis actuels demeurent importants, accentués par l’intelligence artificielle, le numérique, le développement durable, l’EDI (équité, diversité, inclusion) et l’éthique, mais aussi, par toute la transformation du travail. Par ailleurs, il s’agit d’une fort belle occasion de rendre les organisations plus saines et plus performantes, tout en mettant l’humain au cœur de ces transformations. »
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